Petru Santu dans le Journal de la Corse : l'exposition ! Première partie de l'article.
Pour ceux qui n'arrivent pas à lire :
Janine de Lanfranchi, après« Rahan », voici « Petru Santu », donc une autre exposition au musée de l'Alta Rocca. Pourquoi ce désir d'exposer de la bande dessinée en vos murs ? J. d. L. : En 2007, Rahan, héros mythique de la Préhistoire qui a tenu en haleine les jeunes lecteurs de Pif dès la fin des années 60, était le guide parfait pour faire voir la Préhistoire autrement. L'idée géniale de faire entrer Rahan et la BD au musée venait de ma collègue de Bougon, Hélène Lacroix, qui a eu le "culot" de monter l'exposition en partenariat avec le centre de la BD d'Angoulême. Avec son accord, celui du centre et des créateurs de Rahan, le concept a été repris à Levie et adapté à notre musée. Le succès rencontré a montré que la BD était un formidable média pour raconter la Préhistoire. Rahan devenait un guide idéal pour permettre une découverte des différentes inventions des « âges farouches » : le feu, la chasse et les armes, la navigation... Petits et grands entraient dans un univers magique et coloré pour s'instruire tout en s'amusant. C'était une« déam'bullation » sympathique, atypique, qui rendaient les visiteurs heureux. Quatre ans après, j'ai eu envie de renouveler l'expérience avec un personnage bien de chez nous. L'idée de créer une exposition 100% corse est née d'une rencontre avec Frédéric Federzoni. L'originalité de ses créations, son enthousiasme et son talent ont été le point de départ. Son personnage Petru Santu était à l'évidence un guide rêvé pour promener les visiteurs dans la Corse d'hier à aujourd'hui. Le personnage est né aux temps préhistoriques. Il a tout vu, tout connu. Il peut tout raconter. Il est servi par des textes courts, simples, incisifs de Frédéric Bertocchini. Bref, l'idée de créer une exposition avec Petru Santu est née d'un coup de foudre et d'un coup de cœur.
Qu'est-ce qui vous a plu dans Petru Santu ? J. d. L. : Petru Santu est un "cicerone" parfait. Il a une bonne bouille, une "gueule" et un bel esprit. C'est un petit vieux ronchon et sage, philosophe, qui a vu l'île évoluer. Il traverse le temps comme Rahan et s'accommode de toutes les situations avec humour. Il n'est jamais méchant. En fait, il observe sans juger. Et il nous fait partager son regard. Le lecteur voit avec les yeux de Petru Santu. C'est cette originalité qui fait de ce personnage un guide idéal dans un musée. Il livre sa vision et la donne à voir, à partager. Au visiteur de juger ensuite... et de revisiter avec lui des thèmes de société et d'actualité. En mars 2011, le musée permettra de découvrir le petit monde de Petru Santu et de se promener de bulles en bulles dans la Corse d'aujourd'hui en découvrant ici et là les traditions perdues, les rites oubliés, les nouvelles modes. L'humour se mêle à l'histoire, les clichés exacerbent la nostalgie et la simplicité rend la lecture évidente. Petits et grands trouveront un thème à croquer, à méditer. Et pour ne pas tout dévoiler en une fois, Petru Santu reviendra au musée en novembre pour en dire davantage... Petru Santu à Levie c'est la Corse croquée par Federzoni et racontée par Bertocchini et illustrée par des éléments puisés dans le musée.
La BD dans les musées, c'est plutôt rare non ? J. d. L. : La BD entre dans les musées lentement. On a eu Astérix, Tintin, Bécassine, Rahan hors de l'île... et maintenant Petru Santu chez nous. Le rôle pédagogique de la BD est indéniable. Les dessins, les couleurs, les textes courts permettent de faire passer des notions, des idées et également d'expliquer au moyen de quelques bulles. Musée et BD ont vocation à donner à voir avec concision et clarté. Par ailleurs, la préhistoire et l'histoire de Corse peuvent être ainsi enseignées. La BD est un média moderne qui a le vent en poupe et qui permet de rêver tout en s'instruisant. C'est une formidable invitation à découvrir des thèmes sous un angle humoristique, une occasion d'aborder des thèmes sérieux avec légèreté, une incitation aussi à aller plus loin. La BD au musée mais pas seulement au musée à l'avantage de marier l'esthétique et le didactique. En outre, elle convient bien à l'Histoire.
Comment le public appréhende-t-il le 9e art dans un musée ? J. d. L. : Il semble que le 9e art convienne à tous les publics. Quelqu'un disait que c'est un art à lire devenu un art à voir. Il a de ce fait sa place au musée. Il touche le jeune public et le public familial. Il permet une flânerie récréative et instructive. Ce qui est un luxe non négligeable. Le public aime la BD et surtout aime rencontrer les créateurs. La magie de la création fascine. La foule qui se pressait autour de Frédéric Federzoni à Filitosa à l'été 2010 montre que la BD fascine autant hors les murs que dans un musée. Le public est friand d'histoires courtes. En fait, dans ce monde où tout va vite, où l'on a peu le temps de se poser, le langage BD et le saut de bulles en bulles conviennent aux visiteurs libellules. En outre, dans les musées, on évite les textes longs, souvent rébarbatifs. Alors pour expliquer un concept, une technique, pour décrire, la BD devient la solution idéale. Enfin, il faut que nos musées ouvrent leurs portes à toutes formes d'expression artistique et à tous les arts, le 7e, le 8e et le 9e... puisque la Corse recèle des trésors.
La bande dessinée corse se développe, avec plusieurs auteurs qui font vivre cet art. Quel est votre regard sur cette production ? J. d. L. : La BD corse a pris son envol. Elle semble bien se porter. Les débuts ont été sporadiques et timides. Mais depuis 5 ans me semble-t-il, il y a un bouillonnement créatif avec des dessinateurs talentueux qui jouent la carte de l'originalité et de la variété sans complexe. On ose tous les sujets. Je suis surprise aussi de la qualité des auteurs. Je pense notamment à Frédéric Bertocchini, le scénariste, qui est un historien qui a choisi de traiter l'Histoire connue (P. Paoli) et moins connue (Le Bagne des enfants) par la voie de vignettes et petites cases. La BD permet de vulgariser et d'enseigner. La BD corse existe bel et bien. Elle a ses artistes groupés en collectif, elle tient son salon, elle a des éditeurs (enfin!), elle s'affiche en vitrines, elle se vend hors de l'île... dommage qu'elle ne soit pas enseignée. En tout cas, pour les musées c'est une aubaine car le large spectre offert par les auteurs permet désormais d'envisager de traiter bien des thèmes.
E. C
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